L’univers livresque
de Thomas Lepeltier
alizart-pop-theologie
Compte rendu du livre :
 
Pop Théologie.
Protestantisme et postmodernité,
de Mark Alizart,
Puf, 2015.

En 1904, le sociologue Max Weber publie L’Éthique protestante et l’esprit du capitalisme. Il y défend la thèse que le capitalisme s’est développé sous l’influence de l’éthique protestante, en particulier calviniste. Cette dernière aurait en effet favorisée l’esprit d’entreprise, l’autodiscipline et le désir d’accumulation de richesses comme but en soi. L’argument est le suivant. Dans le catholicisme, le salut éternel était accordé à celui qui entreprenait des actions bonnes durant sa vie. Mais, avec la Réforme, le salut se mit à dépendre d’une décision arbitraire de Dieu. Pour dissiper l’angoisse résultant de cette prédestination, les protestants se mirent à chercher un signe de leur élection divine. Ils le trouvèrent dans leur propre réussite ici-bas. Aussi firent-ils du travail lucratif une éthique de vie. Le capitalisme moderne y aurait trouvé sa dynamique.

Que vaut cette thèse ? Il y a eu de nombreux débats à son sujet. En tout cas, on pourrait facilement penser qu’elle ne s’applique pas à la société occidentale depuis le milieu du XXe siècle. Qu’y a-t-il en effet de commun entre l’austérité protestante et la société des loisirs, de la consommation et de la culture pop ? Pourtant, tout le propos de Mark Alizart dans ce livre est de prolonger cette thèse de Max Weber en tentant de montrer que notre post-modernité trouve ses racines dans les réformes de la Réforme, c’est-à-dire dans les « mouvements d’éveil » (« Great Awakening ») des communautés protestantes au XIXe siècle. Cette nouvelle théologie qui invite à retrouver Dieu serait en effet porteuse de nos désirs d’émancipation, de notre valorisation de l’exaltation, des appels très « new âge » à croire en soi-même et des désirs de « lâcher prise » si chère à la culture pop. Pour étayer sa thèse, l’auteur brasse une multitude de réflexions sur la théologie, la philosophie, la littérature, le cinéma, etc. Dans ce tourbillon d’idées, il cherche à montrer que nous serions tous, sans le savoir, des protestants. Travail ambitieux et stimulant. À débattre…


Thomas Lepeltier, Sciences Humaines, 271, juin 2015.


Pour acheter ce livre : Amazon.fr