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Compte rendu du livre :

La Philosophie des sciences au XXe siècle,

d'Anouk Barberousse, Max Kistler et Pascal Ludwig,

Flammarion (Champs-Université), 2000.

      Il existe une image désuète de la science encore très répandue. C'est celle qui en fait un ensemble de théories construites sur des bases suffisa­ment solides pour que nous n'ayons pas à douter de leur vérité. Or cette image a été fortement bousculée tout au long du XXe siècle, aussi bien par les avancées des disciplines scientifiques elles-mêmes, que par le travail des historiens et, en ce qui nous concerne ici, des philosophes.
      On avait pensé d'abord que la science pouvait se fonder sur des données empiriques absolument certaines. Il est apparu que les observations ne sont pas indépendantes des théories scientifiques. On avait pensé qu'il était possible de garantir la validité des lois de la nature obtenues par induction, c'est-à-dire obtenues à partir de faits singuliers. Désormais, ces lois apparaissent plutôt comme des conjectures inventées par les scientifiques. On avait pensé que l'expérimentation permettait d'éliminer, entre des hypothèses rivales, celles qui étaient les moins adéquates à la réalité. Il est apparu que, en toute rigueur, il n'est jamais possible d'isoler les éléments d'une théorie — telle hypothèse plutôt que telle autre, par exemple — dans un test expérimental.
      Après avoir présenté ces thèmes importants de la philosophie des sciences, ainsi que ceux relatifs aux notions d'incertitude, d'explication et de causalité, le problème qui se pose aux auteurs de ce livre d'introduction est de rendre compte de l'évolution des théories scientifiques. Pour aborder ce sujet hautement controversé, ils optent pour une approche cognitiviste. Cela veut dire qu'ils s'orientent, par exemple, vers les théories qui établissent un parallèle entre la façon dont les enfants se forment une représentation du monde et la façon dont les théories scientifiques ont évolué au cours de l'histoire. Cela veut aussi dire qu'ils soutiennent les recherches qui étudient le fonctionnement du cerveau afin de comprendre les processus cognitifs. Pourquoi pas... si cette approche n'est pas exclusive. Néanmoins les auteurs prétendent ainsi développer une « philosophie scientifique des sciences » ! Après avoir montré tout ce que pouvait avoir justement de problématique la notion de science, on est en droit de se demander si ce n'est-ce pas là faire preuve de naïveté ?

Thomas Lepeltier, Sciences Humaines, 118, juillet 2001.

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