Compte rendu du livre :

Forme et origine de l'univers.
Regards philosophiques sur la cosmologie,

d'Aurélien Barrau et Daniel Parrochia (eds),

Dunod (UniverSciences), 2010.

      Revenir sur des moments clefs de l'histoire de la cosmologie, en présenter les grandes articulations actuelles, et offrir une réflexion philosophique sur ses tenants et aboutissants, tels sont les trois objectifs de ce livre collectif. L'entreprise est incontestablement réussie.
      Sur le plan historique, l'ouvrage présente la logique de certaines cosmologies de l'Antiquité ; il analyse les mises en garde d'Emmanuel Kant, d'Auguste Comte et de Gaston Bachelard vis-à-vis des prétentions de toute cosmologie à pouvoir véritablement décrire l'univers ; ou encore, il rappelle comment, par un renversement de ces formes de scepticisme, le modèle du big bang fut inventé.
      Concernant la situation actuelle, le livre présente la version de ce modèle du big bang sur laquelle existe de nos jours un très large consensus ; il explore les liens unissant les recherches sur l'infiniment petit et celles sur l'infiniment grand ; il évoque des théories — cosmologie quantique et théorie de cordes — qui pourraient servir à mieux comprendre les « premiers instants » de l'univers auxquels conduit ce modèle du big bang ; ou encore, il se penche sur les modèles d'univers multiples en plein développement de nos jours.
      Sur le plan épistémologique, l'ouvrage aborde de front la question de la scientificité de la cosmologie ; il réfléchit à la possibilité, ou impossibilité, d'un discours sur l'origine ; ou encore, il tente d'appréhender le concept de temps tel qu'il est utilisé en cosmologie.
      Bien que cette liste de sujets traités ne soit pas exhaustive, elle est probablement suffisante pour souligner l'ambition de l'ouvrage. Comme la plupart de ses chapitres sont relativement clairs et bien écrits, il constitue une très riche source d'informations et de réflexions sur la cosmologie, que l'on peut recommander sans hésiter à tous les esprits curieux.
      On regrettera seulement qu'un ouvrage qui se présente comme un ensemble de « regards philosophiques sur la cosmologie » n'ait pas adopté une approche davantage critique vis-à-vis de cette discipline. En effet, la philosophie des sciences ne consiste pas uniquement à analyser la signification des discours scientifiques ou à en mesurer toutes les conséquences ; elle consiste également à prendre du recul vis-à-vis de ces discours, pour en évaluer les éventuelles limites, voire les possibles illusions. Que les mises en garde d'un Kant, d'un Comte ou d'un Bachelard se soient finalement avérées infondées n'implique pas forcément que ceux qui veulent philosopher doivent être docilement à l'écoute de ce que racontent les cosmologistes. Philosopher, n'est-ce pas commencer par douter ?

Thomas Lepeltier, compte rendu publié sous une forme abrégée dans,
Pour la science, 401, mars 2011.

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