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Compte rendu du livre :

L'Âge d'or de l'empirisme logique.
Vienne — Berlin — Prague (1929-1936),

de Christian Bonnet et Pierre Wagner (eds),

Gallimard (Bibliothèque de philosophie), 2006.

      Pendant longtemps, l'empirisme logique n'a pas eu bonne réputation en France. Ce courant de pensée, qui prit son essor au début du XXe siècle, réunissait des philosophes qui voulaient réformer la philosophie pour la mettre en accord avec les bouleversements récents de la physique et la rendre plus rigoureuse, voire scientifique. Situés à Vienne, Berlin ou Prague, ces philosophes publièrent en 1929 un Manifeste du Cercle de Vienne qui initia la période la plus féconde du mouvement. Celle-ci prend fin au milieu des années 1930, quand la plupart des représentants de l'empirisme logique se réfugient à l'étranger face à la montée en puissance du nazisme. À cette émigration s'est ajoutée, à partir des années 1950, une remise en cause radicale de certaines de leurs thèses. Ce mouvement n'en a pas moins influencé en profondeur la philosophie anglophone contemporaine. C'est ce que le livre de Pierre Jacob, qui présentait quelques textes importants des acteurs de ce passage, De Vienne à Cambridge (Gallimard, 1980), illustrait parfaitement.
      C'est maintenant au tour de Christian Bonnet et Pierre Wagner d'offrir une anthologie de textes écrits par les représentants de l'empirisme logique durant l'âge d'or du mouvement. L'entreprise est salutaire. De ce mouvement, on a souvent fait une école aux thèses bien arrêtées. Or ce qui réunissait ces philosophes était moins une doctrine commune qu'une volonté de débattre sur des questions philosophiques apparues à la suite de l'évolution de la physique et de la logique au début du XXe siècle. On voit ainsi que les critiques de l'empirisme logique n'ont mis en cause qu'une version réductrice de ce courant philosophique. Par exemple, on l'a souvent accusé d'être trop exclusivement orientée vers la logique, au détriment d'autres approches. Pourtant, tous les empiristes logiques n'ont pas placé la logique au centre de leur réflexion. Pour éviter le dédain simpliste, il était temps d'opérer ce retour aux textes.

Thomas Lepeltier, Sciences Humaines, 177, décembre 2006.

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