Compte rendu du livre :
Ahimsa.
Violence et non-violence envers les animaux en Inde,de Florence Burgat,
Éditions de la Maison des sciences de l’homme, 2014.Pour les Occidentaux, l’Inde est le pays des vaches sacrées. D’où l’idée que ces bovins y sont respectés. Pourtant, ce pays est devenu, en 2012, le premier exportateur de viande bovine dans le monde. Ce paradoxe invite à revoir une image quelque peu naïve de la façon dont on traite les animaux au pays de la non-violence. La philosophe Florence Burgat est justement allée voir sur place, notamment pour s’informer auprès des mouvements et organisations qui défendent les animaux. Elle nous restitue ici son journal de voyage qui reflète bien sa perplexité face à de nombreuses situations de souffrance des animaux (et des humains). Puis, dans une longue postface, elle apporte un éclairage historique sur les relations que l’Inde entretien avec le végétarisme, la non-violence, la question du sacrifice, etc. Enfin, le livre se conclut par quelques traductions de textes de Gandhi où celui-ci explique comment sa doctrine de la non-violence doit s’appliquer aux animaux dans des situations concrètes.
L’idée de non-violence (ou « Ahimsa » en sanskrit) est bien ancrée dans la culture indienne, même si elle n’est portée à son plein accomplissement que par le jaïnisme, religion minoritaire, et non par l’hindouisme ou le bouddhisme. La Constitution indienne fait d’ailleurs de la compassion à l’égard des êtres vivants l’un des devoirs fondamentaux des citoyens. Il existe également depuis des siècles des refuges et des hôpitaux pour les animaux improductifs ou abandonnés. Pourtant, dans le même temps, la violence exercée contre les animaux est très présente, comme l’illustre le fait que les vaches « sacrées », quand elles ne sont pas abattues clandestinement, sont amenées se faire dépecer dans les États (comme le Kerala et le Bengale Occidental) où leur abattage est autorisé. Gandhi n’avait d’ailleurs de cesse de dénoncer cette hypocrisie des hindous qui consiste à brandir le caractère sacré des vaches tout en les vendant aux bouchers musulmans. Bref, plus possible, après ce livre, de voir l’Inde comme un modèle de protection animale. L’hypocrisie y prend juste d’autres formes qu’en Occident, où la cruauté à l’encontre des animaux est proscrite par la loi, mais où leur exploitation violente se pratique à grande échelle.Thomas Lepeltier, Sciences Humaines, 262, août-septembre 2014.
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