Compte rendu du livre :

Légendes des Assassins.
Mythes sur les Ismaéliens,

de Farhad Daftary,

Traduit de l'anglais par Zarien Rajan-Badouraly,
Préface de Christian Jambet,
Vrin (Études musulmanes), 2007.

      Les Assassins n'ont jamais eu bonne presse. Avant d'être un nom commun, le terme « Assassins » servait au Moyen Âge à désigner les membres d'une communauté chiite du Moyen-Orient, en l'occurrence la branche syrienne des Ismaéliens nizarites. De nos jours, ces derniers sont encore présentés comme les premiers terroristes islamiques. La mauvaise image de ces Ismaéliens vient directement de la haine et de l'incompréhension dont ils ont souffert. De fait, jusqu'à récemment, ils n'ont été abordés qu'à partir de données provenant quasi-exclusivement de leurs ennemis, en particulier des sunnites qui les considéraient comme des hérétiques. C'est ainsi que, dès le XIIe siècle, les Croisés débarquant en terre d'Islam furent confrontés à une légende noire qui circulait déjà et qui n'avait d'autre but que de les discréditer. Effrayés par quelques « attentats-suicides » menés par certains de leurs membres et complètement ignorants de la religion de l'Islam, ils brodèrent sur cette légende noire et disséminèrent en Europe leurs propres mythes des Ismaéliens.
       Comment peut-on accepter de se sacrifier pour éliminer un adversaire politique ? Comme de nos jours, l'explication simpliste était celle du lavage de cerveau. D'où la fabrication de légendes qui tournaient autour des méthodes de recrutement, d'endoctrinement et de consommation de drogues — notamment de haschisch, d'où vient le terme « assassin » — de ceux destinés à commettre ces méfaits. Or, depuis les années 1930, les études ismaéliennes ont été révolutionnées grâce à la découverte d'authentiques textes ismaéliens. Dans un ouvrage de référence, Les Ismaéliens. Histoire et traditions d'une communauté musulmane (Fayard, 2003), Farhad Daftary avait montré que les Assassins possédaient une riche culture qui n'en faisait pas un ordre sinistre de drogués dévoués à des actions criminelles. Avec ce nouveau livre, qui peut être vu comme un complément du précédent, il montre comment la légende des Assassins s'est construite : une saine érudition pour éclairer un univers si mal compris en Occident.

Thomas Lepeltier, 2007.

Pour acheter ce livre : Amazon.fr