L’univers livresque
de Thomas Lepeltier
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Compte rendu du livre :
 
Le Fil de la vie.
La face immatérielle du vivant,
de Jean-Louis Dessalles, Cédric Gaucherel
et Pierre-Henri Gouyon,
Odile Jacob, 2016.

En 1976, avec son ouvrage Le Gène égoïste, le biologiste Richard Dawkins popularise la thèse que la sélection naturelle opère sur les gènes et non sur les individus (ou les groupes d’individus). Plus la descendance d’un individu est grande, plus les gènes ayant contribué à cette capacité de reproduction se multiplient. Mais l’individu, lui, finit par mourir. Les organismes vivants apparaissent donc comme de simples « véhicules » des gènes. Du coup, l’histoire de la vie peut être vue comme celle de la diffusion de ces derniers.

Les trois auteurs du Fil de la vie rejettent eux aussi l’idée que la sélection naturelle s’exerce sur les individus, mais ils estiment que la logique du vivant s’appréhende mieux en termes d’information que de gènes. Certes, toute information a besoin d’un support matériel. Dans l’évolution du vivant, ce support, c’est-à-dire les gènes, ne serait toutefois pas l’élément le plus fondamental. Tout comme les organismes vivants, les gènes, pris comme éléments matériels, ne durent pas. Ce ne sont pas eux qui luttent pour leur survie. Ce sont les messages informationnels qui passent d’individu à individu, et de gène à gène. Ce sont eux qui se transforment et éventuellement subsistent. Ils changent même régulièrement de supports. Ce qui montre bien que ces derniers ne sont que des hôtes provisoires de l’information. En perdurant au-delà des substrats matériels dans lesquels elle s’inscrit, celle-ci serait ainsi le véritable « fil de la vie », c’est-à-dire ce qui nous relie à nos origines et aux autres êtres vivants.

Une fois défini ce changement de perspective, il ne reste plus aux auteurs qu’à tenter de montrer qu’il permet de mieux comprendre de multiples phénomènes, en allant de la biologie moléculaire aux écosystèmes en passant par la communication animale. Pas de doute que la tentative est stimulante. Mais peut-on se permettre d’aller jusqu’à dire, avec eux, que « l’information vit » ?

Thomas Lepeltier,
Sciences Humaines, 287, décembre 2016.


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