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Compte rendu du livre :

Ni Chose ni personne.
Le corps humain en question,

de Bernard Edelman,

Hermann (Philosophie), 2009.

      Il fut un temps où le vivant était sacré et n'appartenait à personne. Puis on s'est mis à le manipuler, à le triturer, à le recomposer. Notre rapport au corps humain en a été bouleversé. De nos jours, des scientifiques vont jusqu'à faire breveter certains de nos gènes. C'est une procédure qui aurait été impensable il y a quelques décennies. Comment interpréter cette mutation du regard sur le corps humain ? À qui appartient-il ? Qu'est-il ? Que représente-t-il ? C'est à ces questions que se confronte Bernard Edelman . Il le fait avec l'œil du juriste qu'il est. Le droit, rappelle-t-il, est l'instance qui dit le permit et l'interdit, qui produit des normes, et qui légitime des actes. C'est donc un très bon révélateur de nos manières de penser.
      À travers arrêts, jugements et décisions de justice, Edelman révèle l'évolution du statut du corps humain. Est-il devenu une chose ? Pas complètement, mais plus qu'auparavant. C'est que le droit hésite et tergiverse face à une science conquérante. Par exemple, en termes juridiques, l'embryon n'est ni une personne ni un matériau biologique. Quant à l'adulte, il est propriétaire de son corps sans l'être forcément de ses cellules et tissus. Comme pour compenser cette chosification rampante, les tribunaux peuvent parfois considérer un cadavre comme une personne virtuelle. Alors ? Mon corps est-il moi ou un matériau à travailler, voire exploiter ?
      Disons-le tout net : ce livre ne tranche aucun des problèmes qu'il soulève (qui serait en mesure de le faire ?). Mais la perspective juridique par laquelle il les aborde est roborative.

Thomas Lepeltier, Sciences Humaines, 210, décembre 2009.

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