Animal Ethics in the Wild.
Wild Animal Suffering and Intervention in Nature,
de Catia Faria,
Cambridge University Press, 2023.
De nos jours, presque tout le monde reconnaît qu’il ne faut pas faire de mal aux animaux sans nécessité et qu’il faut les aider quand cela est possible. Par exemple, lors d’une promenade, il est bien vu de secourir une biche qui se serait coincé ou blessé la patte. Mais, au-delà de ce genre de petites aides ponctuelles, l’idée que nous devrions intervenir de manière systématique dans la nature pour aider les animaux sauvages peut sembler saugrenue. C’est pourtant l’idée que défend la philosophe Catia Faria dans ce livre. Elle commence par rappeler que les animaux, en raison de leur capacité à souffrir et à éprouver du plaisir, doivent être considérés moralement : leur sort leur importe et nous ne devrions donc pas être indifférents à ce qui leur arrive. Puis, à l’encontre de l’image romantique d’une nature harmonieuse, elle met en évidence la grande souffrance des animaux sauvages, très souvent victimes de la faim, de la soif, de blessures, de maladies, de parasites et de prédateurs. Il est donc immoral, avance-t-elle, de les abandonner à leur triste sort.
Cette idée rencontre bien sûr des objections. Faria en liste six. D’aucuns objectent ainsi que l’intervention risque d’empirer la situation, qu’elle aura un impact insignifiant, qu’elle va à l’encontre d’autres valeurs, comme la préservation des écosystèmes, qu’elle n’est requise que si nous avons des relations particulières avec les animaux, comme nous pouvons en avoir avec des animaux de compagnie ou domestiques, qu’il y a d’autres priorités et, enfin, qu’en raison de la complexité des écosystèmes le problème de la souffrance des animaux sauvages est insoluble. À chacune de ces objections, Faria répond en détail. Selon elle, nous devons donc, dans la mesure de nos moyens, essayer de prévenir et de réduire la souffrance des animaux sauvages. La question de déterminer quelles sont les meilleures interventions à entreprendre reste bien sûr ouverte. Cette tâche incombe aux écologues, éthologues et biologistes. Au moins, avec ce livre, l’auteur espère avoir montré que nous avons un devoir d’intervenir dans la nature pour aider les animaux sauvages et qu’il ne faut donc plus, comme on l’entend souvent, chercher à préserver la nature de tout impact humain.
Thomas Lepeltier,
Sciences Humaines,
357, avril 2023.
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