Compte rendu du livre :

Knowledge is power.
How Magic, the Government and an Apocalyptic
Vision inspired Francis Bacon to create Modern Science
,

de John Henry,

Icon Books, 2002.

      Francis Bacon (1561-1626) est souvent présenté comme le véritable initiateur de la science moderne. Il n'a jamais rien découvert, ni fournit la moindre explication valable d'un quelconque phénomène physique, ni révélé aucune loi de la nature. Mais il a été le premier penseur moderne à avoir clairement défendu l'idée d'une connaissance à la fois fondée sur la méthode expérimentale et la collecte des données empiriques, orientée vers des fins pratiques, porteuse de progrès intellectuel et social, et enfin devant s'institutionnaliser pour devenir efficace. Ce fut suffisant pour que Bacon apparaisse rapidement comme le héraut de la démarche scientifique. Il devint dans l'imaginaire moderne celui qui avait indiqué comment passer des croyances et superstitions à la connaissance objective.
      Toutefois, comme l'historien des sciences John Henry le souligne dans cet excellent petit livre, une telle légende s'est construite en rejetant dans l'ombre l'origine des idées novatrices de Bacon. Henry nous montre en effet que c'est dans la magie, la religion et sa pratique du pouvoir aux sommets de l'État que Bacon fonda sa conception de la science. La magie, à l'encontre des spéculations scholastiques, lui donna le sens de la pratique expérimentale. La religion le poussa à œuvrer au progrès des sciences, et à prôner une domination concomitante de l'homme sur la nature, puisqu'un tel progrès devait annoncer le retour du Christ. L'exercice du pouvoir lui montra l'avantage qu'il y aurait à modeler l'activité scientifique sur la bureaucratie.
      Bacon héros des Lumières ? Certainement. Mais quelle ironie de voir qu'il trouvait essentiellement son inspiration dans ce qu'elles rejetaient !

Thomas Lepeltier, Alliage, 61, décembre 2007.

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