L’univers livresque
de Thomas Lepeltier
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Compte rendu du livre :
 
La Fin du couple
,
de Marcela Iacub,
Éditions Stock, 2016.

La solitude est en augmentation constante. On incrimine souvent la désagrégation des liens sociaux et familiaux traditionnels, mais, selon la juriste Marcela Iacub, le phénomène résulte surtout de la crise du couple. Pendant longtemps, ce dernier s’incarnait dans le mariage de raison. Puis, au xixe siècle, on a voulu croire qu’il allait s’épanouir dans le cadre du mariage d’amour. Le problème est que la passion ne dure pas et que cette valorisation de l’amour conjugal délégitimait toute sexualité en dehors de ce cadre.

Contrairement à ce qu’on aurait pu penser, la libération sexuelle des années 1970 n’a pas permis de sortir de cette impasse. Certes, le mariage n’a plus le monopole de la « bonne sexualité ». Mais une forme d’opprobre s’abat désormais sur les relations « sans sentiment ». Dans le regard de la société, il y a toujours des femmes respectables et des « traînées ». Qui plus est, depuis que la reproduction est choisie, les femmes qui décident d’avoir des enfants se voient socialement obligées de s’investir dans leur éducation. Dans le même temps, la société moderne érige la sexualité active en norme, tout en condamnant avec une dureté croissante les actes sexuels qui ne répondent pas à la libre expression d’un désir. Les personnes qui n’arrivent pas à trouver l’âme sœur se trouvent de facto de plus en plus privées de sexualité. Quant aux couples, ils se désagrègent avec l’usure du désir. Du coup, tout le monde se retrouve plus ou moins seul, dans un état de frustration sexuelle que personne n’avoue.

Pour enrayer cette solitude croissante, Iacub en appelle à la fin du couple en tant que relation fondée sur l’amour et sur une sexualité exclusive s’inscrivant dans la durée. À la place, elle prône la polygamie généralisée, la philanthropie sexuelle qui assurerait des satisfactions minimales à ceux qui sont privés de relation charnelle, la prise en charge de toute l’éducation des enfants par l’État, et ainsi de suite. C’est tout bonnement révolutionnaire ! Est-ce à même de convaincre nos contemporains ? En tout cas, le programme a de quoi donner lieu à de chaudes discussions…

Thomas Lepeltier,
Sciences Humaines, 290, mars 2017.


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