Compte rendu du livre :
De la matière.
Relativiste, quantique, interactive,de Jean-Marc Lévy-Leblond,
Seuil (Traces écrites), 2006.Quand on a bien les pieds sur terre, est-ce que nos pieds touchent le sol ? Non, répond le physicien. En termes de physique microscopique, il n'y a tout simplement pas de contact entre les constituants élémentaires de nos pieds et ceux du sol. La matière, à petite échelle, est de fait bien étrange, n'étant pas vraiment localisée, n'ayant pas vraiment de forme, pouvant être constituée d'éléments absolument identiques, etc. Ce sont toutes ces propriétés de la matière, qui heurtent notre sens commun, que Jean-Marc Lévy-Leblond expose dans ce petit essai, tiré de trois conférences. Ce n'est pas la première fois qu'un livre tente de vulgariser les conceptions modernes de la physique. Celui-ci se distingue toutefois par son efficacité : en peu de mots, dans un style très clair, l'essentiel est dit. En tant que tel, on peut le ranger — même s'il est encore plus cursif — à côté de l'excellent petit livre de Richard Feynman, Lumière et matière (Seuil, 1987).
Œuvres de vulgarisation, ces livres ne peuvent dire ce qu'est la matière. Lévy-Leblond parle à leur propos de « vulgarisation négative », puisqu'ils présenteraient uniquement ce qu'elle n'est pas, comme la « théologie négative » dit ce que Dieu n'est pas. Malgré cette limite, ils ont amplement de quoi satisfaire la curiosité des non-physiciens. Ce genre d'ouvrages sert également à exposer ce qui, dans la physique, bouscule certaines approches naïves de la nature. Notamment, ils remettent en cause la philosophie implicite de tous ceux qui évoqueraient le contact brut de la matière pour justifier telle ou telle conception du monde, alors que, de contact brut, il n'y en a que dans leur tête. Avant d'invoquer la matière, il vaut mieux savoir ce qu'elle n'est pas. C'est une raison supplémentaire pour lire ces ouvrages au « savoir négatif ».Thomas Lepeltier, Sciences Humaines, 181, avril 2007.
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