Au cours de la pandémie de Covid-19, on a souvent entendu dire que les épidémies ont tendance à être causées par la destruction de la biodiversité. L’idée a eu beaucoup de succès dans les milieux écologistes, mais elle n’est pas évidente à comprendre. Pourquoi les épidémies qui sont des zoonoses seraient-elles provoquées par une baisse de biodiversité ? Ne pourrait-on pas penser, au contraire, qu’une diminution de la faune réduirait les risques de contacts entre les humains et les animaux porteurs de pathogènes ? C’est ce paradoxe que tente d’expliquer dans ce livre la journaliste Marie-Monique Robin à travers une enquête auprès d’éminents écologues et épidémiologistes.
La clef de l’explication réside dans un phénomène, mis à jour il y a une quinzaine d’années, dans lequel les animaux qui s’adaptent le mieux à la réduction de la biodiversité sont ceux qui sont davantage porteurs des pathogènes délétères pour les humains. Pas de chance, pourrait-on dire ! Par effet inverse, l’augmentation de la biodiversité a tendance à diluer ces pathogènes. D’où le nom « d’effet de dilution » donné à ce phénomène. C’est incontestablement une découverte fondamentale et l’intérêt du livre est de bien expliquer, grâce aux témoignages des spécialistes, la façon dont elle a été effectuée.
On peut toutefois se demander si les écologues, et l’auteure du livre avec eux, n’ont pas tendance à inconsciemment exagérer le rôle de la baisse de la biodiversité dans les zoonoses. De fait, il ne faut pas oublier que beaucoup d’épidémies se sont déclenchées parce que des humains ont manipulé, à travers la chasse et l’élevage, des animaux pour les manger. C’est vrai pour la grippe espagnole, le sida, Ébola, le SARS, etc., et probablement l’actuelle Covid-19. Certes, il est plus commode d’incriminer une baisse de biodiversité, dont les citoyens s’attristent déjà, que des pratiques alimentaires auxquelles ils sont attachés. Mais, pour prévenir de futures épidémies, ne faudrait-il pas jouer sur ces deux leviers plutôt que sur le premier uniquement ?
Thomas Lepeltier (mars 2021).
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