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Compte rendu du livre :

Dieu, l'univers et la sphère infinie.
Penser l'infinité cosmique à l'aube de la science classique,

de Jean Seidengart,

Albin Michel, 2006.

      De l'Antiquité, le Moyen Âge hérita l'image d'un monde clos, limité par la sphère des étoiles fixes, la Terre au centre. Mais ce cosmos s'accordait mal avec le Dieu infini de la théologie médiévale. Pourquoi un Dieu créateur tout-puissant aurait-il créé un unique monde fini ? N'aurait-il pas pu créer un univers infini peuplé d'une infinité de mondes ? Avant que la théologie de la toute-puissance puisse disposer de la cosmologie qu'elle méritait, il fallut toutefois attendre l'innovation copernicienne qui fit de la Terre une planète tournant autour du Soleil. Mais l'étape, nécessaire, n'était pas suffisante puisque Copernic se plaçait toujours dans un monde fini.
        Jean Seidengart, qui retrace ici minutieusement l'introduction de la notion d'infini dans la pensée cosmologique, considère que c'est Giordano Bruno (1548-1600) qui fit véritablement éclater le monde clos des Anciens. C'est lui qui poussa jusqu'à ses ultimes conséquences le grand renversement copernicien et c'est lui qui opéra le passage du fini à l'infini, du ciel à l'espace, du monde à l'univers. Sur ses traces, presque tous les grands philosophes du XVIIe siècle se rallièrent à l'infinitisme cosmologique. La littérature s'enthousiasma également pour cette nouvelle conception de l'univers et joua du thème de la pluralité infinie des mondes. L'âge classique élabora ainsi une nouvelle conception de l'univers en lui appliquant un outillage conceptuel élaboré dans le creuset de la théologie.
      Si l'homme prit alors conscience de sa petitesse insignifiante au regard de l'immensité cosmique, lui qui se vivait auparavant au centre d'un monde clos, il n'en sortit nullement humilié, comme on le répète si souvent. Au contraire, comme le montre Seidengart, l'homme en tira orgueil puisque, cet univers infini, il estimait pouvoir, par la pensée, le comprendre. À travers cette notion d'infini, Seidengart nous conduit ainsi brillamment de Dieu à l'univers, puis de l'univers à l'Esprit qui le pense.

Thomas Lepeltier, Sciences Humaines, 175, octobre 2006.

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