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Compte rendu du livre :

Controverses sur la science.
Pour une sociologie transversaliste de l'activité scientifique,

de Terry Shinn et Pascal Ragouet,

Raisons d'agir (Cours et travaux), 2005.

      Comment aborder sociologiquement la science ? Pour faire simple, deux courants de pensée s'opposent. D'un côté, il y a une sociologie des sciences, née à la fin des années 1930, qui voit la science comme une activité sociale régie par ses propres règles et développant un mode de connaissance différent des autres modes d'appréhension de la réalité. Ses partisans ne prétendent pas expliquer sociologiquement le contenu des connaissances scientifiques ; seulement les conditions et les modalités de leur production. En opposition à cette perspective, est né dans les années 1970 un courant de pensée qui ramène la science à une activité sociale comme les autres et qui rejette l'idée selon laquelle une raison universelle régirait les processus de découverte et les procédures de réfutation en science. L'acceptation et le rejet des résultats scientifiques s'expliqueraient principalement par des facteurs culturels, des intérêts sociaux et des relations de pouvoir. Du coup, le sociologue cherche à rendre compte du contenu de la science en montrant que la connaissance scientifique est le produit d'enjeux sociaux.
      Après avoir présenté dans ce livre programmatique ces deux orientations de la sociologie des sciences, et certaines des critiques que l'on peut leur adresser, Terry Shinn et Pascal Ragouet cherchent à dépasser cette opposition. Selon eux, il n'est pas plus légitime de dissoudre le contenu de la science dans le social que de considérer ce contenu comme complètement indépendant de son contexte social. S'appuyant sur les travaux de Pierre Bourdieu, ils défendent une sociologie « transversaliste » de l'activité scientifique. Celle-ci serait à même de rendre compte tout à la fois de la dynamique interne des différentes disciplines scientifiques, auxquelles est reconnu une certaine autonomie, de leurs interpénétrations ainsi que de leurs dimensions sociales. L'intention est bienvenue. Reste à montrer la pertinence de cette approche sur des cas concrets.

Thomas Lepeltier, Sciences Humaines, 165, novembre 2005.

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