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Compte rendu du livre :

Le Roman du big bang.
La plus importante découverte scientifique de tous les temps,

de Simon Singh,

Traduit de l'anglais par Philippe Babo et Denis Griesmar,
Hachette, 2007.

      Peut-on raconter toute l'histoire de la cosmologie d'une manière à la fois accessible, vivante et relativement détaillée ? C'est ce qu'a réussi à faire Simon Singh dans ce Roman du big bang. Son livre est effectivement un récit historique de bonne facture qui se lit presque comme une œuvre de fiction. On suit avec entrain l'évolution des idées concernant le cosmos depuis la haute Antiquité jusqu'à la consécration de la théorie du big bang à la fin du XXe siècle. La façon dont l'idée de ce big bang s'est imposée à la communauté scientifique, après son émergence dans les années 1920, est d'ailleurs le thème central du livre dont les trois quarts sont consacrés à la cosmologie du XXe siècle.
      Pour autant, cette écriture presque romanesque de l'histoire de la cosmologie a ses limites. Une aventure romanesque suppose des oppositions claires et tranchées — comme celles qui mettent en scène des bons et des méchants — et des rebondissements et coups de théâtre. Appliqué au monde scientifique, ce procédé se traduit par une tendance à exagérer les oppositions entre savants supposés enfermés dans le passé et savants ouverts aux idées novatrices, nécessairement pertinentes. Chaque arrivée de tel ou tel « héros » scientifique est également décrite comme un événement qui apporte la lumière sur le monde. Aussi l'action devient-elle la lutte entre ces héros de la science et les gardiens des anciennes représentations du monde qui maintiennent l'humanité dans l'obscurantisme.
      Ainsi, à propos des anciens mythes, présentés comme des explications de la nature, l'auteur recourt au concept anachronique d'hérésie pour écrire que quiconque « osait remettre en question ces explications s'exposait à se voir accuser d'hérésie ». De même, louant les Présocratiques, il écrit que « personne, dans de nombreuses autres cultures, n'aurait jamais osé remettre en question les mythologies admises par tous ». Ces affirmations sont gratuites, mais elles entretiennent le souffle romanesque. Plus problématique est l'affirmation qu'avant la publication de L'Origine des espèces (1859) de Charles Darwin « les savants et philosophes acceptaient encore sans états d'âme » que la Terre n'avait que six mille ans. Ce qui est faux. Mais cela rythme bien le récit. Enfin, l'auteur n'hésite pas à affirmer que les partisans du big bang furent les premiers à proposer un modèle cosmologique qui n'était plus dominé « par le mythe, la religion et le dogme ». Ouf, nous voilà sortis des ténèbres ! Quoi qu'il en soit, voici un très bon livre, à condition de le prendre pour ce qu'il est : le « roman » du big bang.

Thomas Lepeltier, Pour la science, 369, juillet 2008.

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