Les Illusionnistes.
Climat, agriculture, nucléaire, OGM :
enquête inédite sur les dérives de l’écologie politique,
de Géraldine Woessner et Erwan Seznec,
Robert Laffont, 2024.
On peut faire le mal en voulant faire le bien. D’une certaine manière, telle est la critique qu’adressent les journalistes Géraldine Woessner et Erwan Seznec au mouvement écologiste. Il n’y a pas de doute que ce dernier est animé de bonnes intentions et qu’il pense sincèrement œuvrer à la protection de l’environnement. Mais, prisonnier d’une idéologie rousseauiste qui idéalise la nature et se méfie de manière irrationnelle de la technologie, il aurait tendance à être contre-productif. La liste des litiges est longue.
Les deux auteurs montrent ainsi comment l’opposition farouche du mouvement écologiste au nucléaire contribue au réchauffement climatique ; comment sa défiance envers les OGM empêche de développer des plantes à la fois plus nourricières et plus à même de s’adapter à ce changement climatique ; comment sa peur de la chimie entraîne une utilisation absurde, parfois plus néfaste, des pesticides et une diabolisation du glyphosate ; comment sa croyance en la bonté de la nature le conduit à survaloriser les produits bio et à dévaloriser de façon inconsidérée les produits synthétiques ; comment sa croyance en des équilibres naturels nuit à la bonne gestion de l’eau ; comment sa vision néfaste de l’activité humaine rend un aménagement rationnel du territoire de plus en plus difficile ; comment son rêve naïf d’une société « autre » le conduit à soutenir des mouvements contestataires, parfois violents, incapables de proposer des modes de sociétés crédibles, et ainsi de suite.
Sur tous ces sujets, l’enquête est précise et montre comment le mouvement écologiste, loin d’être impuissant, comme on pourrait le penser, manœuvre avec une certaine efficacité dans les sphères du pouvoir pour aboutir à ses fins. Les péripéties du nucléaire français l’illustrent bien. Outre ces griefs, les deux auteurs s’inquiètent aussi des tendances antidémocratiques de ce mouvement. Convaincu d’être dans le camp du bien, il semblerait prêt à imposer ses idées à une population globalement récalcitrante. De quoi faire réfléchir…
Thomas Lepeltier
Sciences Humaines, 375, février 2025.
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