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Compte rendu du livre :

Idées reçues en biologie,

de Claude Lafon,

Ellipses (L'Esprit des sciences), 2004.

      Il y au moins deux types d'idées reçues en biologie. Celles qui proviennent d'une mauvaise compréhension de la biologie moderne. Et celles qui se retrouvent au cœur même de cette dernière. Dans cet ouvrage, Claude Lafon entreprend de débusquer les premières. À l'encontre de ce que l'on entend souvent, il explique ainsi que l'évolution n'est pas un progrès ; que l'espèce humaine n'est pas le summum de l'évolution biologique ; qu'il y a autant de coopération que de compétition dans le monde vivant ; que la mort n'est pas inhérente au vivant ; qu'un clone n'est pas identique à son géniteur ; que la vie ne commence pas avec la fécondation , etc.
      De telles mises au point sont importantes tant ces idées reçues se retrouvent dans nombre de débats de société. Mais dénoncer un certain nombre d'idées reçues à propos de la biologie ne met pas à l'abri d'en propager soi-même. Lafon affirme ainsi que la science ne doit pas dire « le bien ou le mal ». En même temps, il approuve au nom de son expertise scientifique la loi qui fait du clonage reproductif un « crime contre l'espèce humaine ». Au-delà de la contradiction entre cette approbation et l'affirmation précédente, on peut se demander si cette prise de position ne repose pas sur un certain nombre d'idées reçues quant au clonage (voir l'excellente analyse critique de cette loi par Philippe Descamps, Un Crime contre l'espèce humaine ? Enfants clonés, enfants damnés, Les Empêcheurs de penser en rond, 2004). Le travail de clarification de Lafon n'en reste pas moins méritoire.
      Pour ceux qui voudraient aller au-delà et traquer les idées reçues pas uniquement sur la biologie mais dans celle-ci, on conseillera le livre de Gérard Nissim Amzallag, La Raison malmenée. De l'origine des idées reçues en biologie moderne, CNRS Éditions, 2002. Cet auteur montre en effet comment la biologie moderne se serait construite trop exclusivement sur le modèle de la physique et ce que ce réductionnisme aurait de néfaste pour la compréhension du vivant. Comme on n'en a jamais fini avec les idées reçues, il n'y a qu'à attendre que soient à leur tour épinglées celles qui sont inhérentes à ce genre de critique de la biologie.

Thomas Lepeltier, Sciences Humaines, 154, novembre 2004.

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