Le Végétarisme des Lumières.
L’abstinence de viande dans la France du XVIIIe siècle,
de Renan Larue,
Classiques Garnier, 2019.
Selon ses détracteurs, l’engouement actuel pour le végétarisme ne serait qu’une mode ; en outre, une mode dangereuse qui, en se préoccupant trop du sort des animaux, irait à l’encontre de l’humanisme des Lumières. Pourtant, dans un de ses précédents livres, Le végétarisme et ses ennemis. Vingt-cinq siècles de débats (Puf, 2015), Renan Larue montrait que les discussions sur la légitimité de la consommation de viande avaient une longue histoire. D’une certaine manière, il n’y aurait donc rien de nouveau dans les débats actuels sur la question animale, si ce n’est leur plus grande intensité. Dans ce nouveau livre, le même auteur, spécialiste de la littérature du XVIIIe siècle, montre comment la philosophie des Lumières, loin d’être hostile au végétarisme, portait au contraire en son sein le projet d’émancipation des animaux qui anime le mouvement végétarien de nos jours.
Renan Larue nous présente ainsi les discussions animées autour de la diététique des régimes sans viande qui séduisaient une partie importante de l’élite intellectuelle de l’époque. Il montre comment la mise à mort des animaux pour les manger choquait également une partie croissante de la population qui supportait de moins en moins la vue du sang, des viscères et des cadavres. Il exhume nombre de textes où les philosophes de l’époque dénonçaient l’injustice faite aux animaux qui se faisaient égorger pour satisfaire quelques plaisirs de table. Il décrit comment, selon nombre d’auteurs d’utopies, le végétarisme pacifie les mœurs et répond à des principes fondamentaux de justice. Il révèle un Voltaire farouche adversaire de la consommation de viande et grand avocat des animaux. Enfin, il souligne comment Rousseau considérait que le végétarisme permettait de retrouver la bonté de l’humanité.
En montrant de manière détaillée que l’appel au végétarisme s’enracine ainsi dans la tradition philosophique dont se réclament, paradoxalement, beaucoup de ses critiques actuels, ce livre adresse finalement à ces derniers une sorte de pied de nez. Il ne reste plus qu’à attendre leurs réponses…
Thomas Lepeltier, septembre 2019.
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